dimanche 8 octobre 2017

TEXTE DE GENEVIÈVE DU BLOG "JE SUIS PERSONNE !"


J'avais envie de vous partager les quelques mots d'une maman qui a su si bien mettre des mots sur la douleur de perdre son bébé.

Cofondatrice du blog ""Je Suis Personne", Geneviève nous livre un témoignage magnifique. Son texte "On m'avait dit..." est si émouvant et pourtant si réaliste quant à ce qu'on ressent le jour où notre vie bascule.


Je vous laisse le découvrir...

"Je ne peux pas dire qu’on ne m’avait pas prévenu, on me l’avait bel et bien dit. On m’a répété encore et encore avant d’avoir un enfant que la première fois que je le prendrais dans mes bras changerait ma vie. On me l’a dit, murmuré et soufflé à l’oreille… « Lorsque tu vas voir son visage, tu vas tomber en amour pour le reste de ta vie » .  Je ne peux pas dire le contraire, c’est exactement comme cela que c’est arrivé, mais je dois t’avouer que je t’aimais déjà, depuis le premier instant, depuis le premier moment où tu t’es installé dans mon ventre. Mais il y a ce petit quelque chose de plus qui s’est produit  lorsque mes bras ont entouré ton petit corps. Tu étais beau, tu étais si beau. C’est avec douceur et tout l’amour du monde que je t’ai serré, embrassé, et doucement, si doucement caressé ton visage. Ton papa était là, juste à côté de moi… en fait, j’étais blottie dans ses bras pour pouvoir te prendre et t’accueillir.  Et puis, j’ai visité tout ton petit corps, si parfait, si fragile. Tu étais là, plus tranquille qu’il n’est possible de l’être. Tu étais enfin avec moi, enfin dans mes bras. Tu étais là et je savais que tu y étais pour peu de temps, que mon temps était compté, que tu ne resterais pas.
On m’avait prévenu que ma vie changerait à jamais, mais on ne m’avait pas dit qu’il y avait cette possibilité que cela ne se passe pas comme prévu. On ne m’avait pas prévenu qu’une infirmière allait doucement venir te porter à moi dans une petite couverture chaude, mais que tout ton corps allait être froid. On ne m’avait pas dit que la minuterie allait démarrer dès le moment où j’allais te prendre dans mes bras. On m’avait parlé de tout cet amour que je ressentirais, mais on ne m’avait pas prévenu de la douleur qui pouvait venir avec elle. On m’avait dit que te prendre allait me faire du bien, mais on ne m’avait pas dit à quel point.
On m’avait dit que je couvrirais de mots, de paroles et d’histoires, mais que pouvais-je te dire à toi mon enfant si cher et si désiré. Comment pouvais-je me faire pardonner. « Je t’aime… maman t’aime tellement… tellement ». C’est la voix brisée, le sourire aux lèvres et les yeux dans l’eau que j’embrassais le visage de ton corps inerte. J’étais bien, et pourtant si mal. Ton corps était présent avec moi, mais ton petit cœur n’avait pas le rythme pour faire ouvrir ces beaux petits yeux cachés derrière la mort. Comment est-ce possible d’être confronté à une injustice aussi grande? Comment est-ce possible de vivre un départ aussi tôt. « Je t’aime… je suis désolée… je t’aime… sois assuré que je t’aime… tellement ». Chaque minute qui passe me rapproche et me sépare de toi. Ils viendront te chercher bientôt, j’en suis certaine, et moi je voudrais simplement courir et disparaître avec toi. Je voudrais que ce moment reste à jamais. Je voudrais que ce sentiment de bien-être qui m’habite en posant les yeux sur toi reste au lieu de laisser place à cette douleur qui m’envahira sous peu. Je n’ai que quelques minutes pour te transmettre, te faire parvenir, te faire ressentir tout l’amour qu’une mère peut avoir pour son enfant, tout l’amour que moi je peux avoir pour toi. C’est un sentiment intense que j’espère ne jamais revivre dans ma vie. C’est un sentiment si fort, si lourd et pourtant si beau. C’est de l’amour brut offert dans la douceur et l’urgence du moment. C’est de l’amour en quelques heures, en quelques minutes, en quelques secondes en ta présence.
On m’avait dit que je ne voudrais plus jamais me départir de toi, mais moi, ta maman, je n’ai pas le choix.  Je devrai quitter cet endroit et te laisser derrière. Je devrai reprendre ma vie presque comme si tu n’en avais pas fait partie. On m’avait dit que ma vie allait changer, mais on ne m’avait pas prévenu du tournant qu’elle pouvait prendre. On ne m’avait pas dit qu’un enfant pouvait changer une vie dans la douleur, dans la peur et dans les pleurs. Et pourtant… pourtant je te regarde en ce moment comme s’il n’y avait pas de lendemain. Je glisse doucement à nouveau, encore et encore, mon index sur ton visage comme pour en mémoriser chaque détail. Je te serre, t’embrasse, t’analyse et te cajole. Toi, mon bébé, mon enfant, une partie de moi… laisse-moi garder en mémoire tous ces beaux moments passés ensemble. Laisse-moi garder de toi que le meilleur, le plus beau, le plus doux. Laisse-moi croire que j’aurais pu bien remplir mon rôle, que j’aurai été une maman extraordinaire… que j’aurai été une maman… que je suis et je reste ta maman…
Et puis le temps est arrivé « Je crois qu’on devrait le laisser partir »… j’acquiesce à la demande de ton père sans trop savoir si moi je le peux, si je suis prête… mais non, je ne suis pas prête, je ne serai jamais prête… comment peut-on être prête? Je sais simplement qu’on ne peut garder ton corps éternellement avec nous. Je sais de manière plus que rationnelle que je ne peux te ramener à la maison avec moi. J’acquiesce et je pleure, j’acquiesce et je sens cette douleur arrivée en moi, trop grande pour mon propre corps, trop grande pour la terre entière. Et je te rends à cette infirmière qui t’a apporté à moi quelques instants plus tôt. On dirait que cela n’a fait qu’une seule seconde. Je te rends et te regarde partir, car c’est ce que je dois faire; je te regarde partir en ayant que la chaleur de mes larmes pour me réconforter. Ton papa me serre très fort dans ses bras. Je dois me rendre à l’évidence, la mort a eu raison de ton avenir. Et malgré tout l’amour que ton papa m’offre, malgré tout le soutien et la tendresse et qu’il me donne, mon cœur est brisé en plus de morceaux que je ne connais de chiffres pour compter…"   - Geneviève - 

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